Derniers jours d'août, les épilobes cotonneux qui sèment leurs graines au vent annoncent la fin de l'été, le chalet que nous construisons est quasiment fini, et pour nous il est temps de continuer.

On quitte Homer en remontant la péninsule de Kenaï sous une pluie battante jusqu'à Anchorage, pour s'arrêter un peu plus loin à Eklutna. Où on se fait une superbe ballade dans les couleurs d'automne : Mélanges de fauve, orange, fuchsia et jaunes, qui nous accompagneront jusqu'à Fairbanks. Là bas, nous cherchons le concessionnaire Oural, pour un problème qui nous semble venir de la soupape, mais en arrivant à l'adresse indiquée, surprise, l'enseigne est décrochée, le local est vide... Il y a quelqu'un ?! En fait, le magasin vient tout juste de mettre la clef sous la porte, ils font le grand nettoyage. Mais Pete, le mécano, un puriste Harley reconverti Uraliste, nous donne un sérieux coup de main et de bons conseils. Merci Pete ! Tous les soirs, avec Shay, un ami israélien rencontré à Homer, nous guettons en vain les aurores boréales autour du feu en goûtant à la délicieuse cuisine israélienne et arabe, babaganousch et matfouné...


Nous repartons de Fairbanks avec les grues et oies du Canada qui passent au dessus de nos têtes par centaines en lançant leurs cris de crécelle, alors qu'elles aussi commencent leur migration vers des latitudes plus douces. On longe l'Alaska Range, une immense chaîne de montagnes blanchie par les récentes neiges dans une pure lumière d'automne. Le 11 septembre, après que deux fois de suite des chasseurs nous aient demandé d'un air suspicieux " mais, vous êtes vraiment russes.. ? ", on apprend l'incroyable attentat qui vient tout juste de secouer New York. Les nord-américains étant toujours autant chatouilleux et facilement paranos par rapport à tout ce qui pourrait être russe ou communiste, nous nous arrêtons vite au bord de la route enlever cette étoile rouge que l'on venait de coller à l'avant du panier. D'autant plus qu'aujourd'hui, on passe la frontière pour basculer vers le Yukon !

Au poste frontière, laurent, toujours un peu distrait, dépasse allègrement le panneau " stop " pour aller se garer tranquillement 20 mètres plus loin sur un bas-côté. Mais, ce jour là entre tous, cela ne fait pas rire du tout la douanière, mais alors vraiment pas du tout ! Arrivée en courant, elle fouille pour le coup intégralement tous nos sacs, dans le vent glacial de ce col perdu au milieu d'une mer de collines pelées, tout en nous expliquant la gravité de l'infraction que nous venons de commettre.. Nous repartons de là frigorifiés, mais soulagés quand même. Ce même soir, à la tombée de la nuit, alors que nous nous apprêtons à migrer sous la tente après avoir rangé toutes les affaires, . Mais. cette vague lueur dans le ciel, ce ne serait pas ? ! ?! Nous restons dehors jusqu'à minuit, nous réchauffant de temps en temps autour du feu, les yeux rivés sur ce spectacle époustouflant de faisceaux lasers zigzaguant à travers le ciel, et de panneaux de lumière verdâtre mouvants à une vitesse surréelle : notre toute première Aurore Boréale !


De l'autre coté de la frontière, Dawson City, destination de la ruée vers l'or du Klondike de 1898, est en fait aujourd'hui une toute petite ville, où les façades western en bois peintes semblent n'abriter qu'hôtels et restaurants tandis que les rues en terre battue voient surtout défiler les camping-cars de location. On continue notre redescente au sud.


Whitehorse, Yukon. 21000km et un peu plus d'un an de voyage. Nos pneus sont lisses, on a usé jusqu'à la moelle nos chaussures, et le croisillon de transmission du cardan vient tout juste de nous lâcher. Pas de problème, comme d'habitude nous commandons la pièce à nos amis d'Ural América, à Preston. Mais dix jours plus tard, le croisillon qui devait arriver en 5 jours n'est toujours pas là. Nous apprenons que tous les courriers envoyés par avion ont pris un retard énorme vu le renforcement des contrôles anti-terroristes, et qu'il nous faudra attendre 2 semaines de plus ! Nous tuons le temps avec notre ami Fabien, venu nous rendre visite de France et avec qui nous étions supposés faire un bout de route.

Mais de balades en séances de sauna, en passant par 5 jours de canoë sur le Yukon jusqu'au lac Laberge, ou en innombrables cafés-donuts au Tim Horton's local, nous avons vite fait le tour des ressources de Whitehorse. Plus de trois semaines, et toujours rien... Fabien, en partant pour Inuvik, nous chambre en nous rappelant le slogan du film de l'office du Tourisme, "Le Yukon, c'est tellement bien qu'on n'arrive jamais à en repartir !..." Quatre semaines. Le camping où nous logeons a fermé depuis longtemps, et il commence à neiger dru... Quant à ce fameux croisillon, il n'a même pas encore passé la frontière ! A bout de patience, nous nous en faisons réexpédier un second, mais cette fois ci par UPS.. Alors qu'on n'y croit plus et qu'on commence à envisager de travailler dans le mushing, l'entraînement des chiens de traîneau pour la Yukon Quest, ... la pièce arrive miraculeusement la veille au soir du départ de Fabien !

Le lendemain nous réparons la moto par -10°, réchauffant les outils au coin du feu, et quittons enfin Whitehorse, couverte d'un épais tapis de neige, après 5 semaines d'attente. Deux jours magiques à rouler sur la route blanche et gelée jusqu'à Haines, le départ du ferry pour le passage intérieur Alaskan. Paysage et ride fabuleux, mais le soir, frigorifiés, notre première urgence est de dégager la neige et allumer un grand feu pour se réchauffer ! A Haines en revanche, sur la côte sud ouest de l'Alaska, la neige s'est transformée en pluie, et on a remonté le temps : ici les arbres sont encore couverts de feuilles. Glacés par ces deux jours dans le froid et la neige, on n'en apprécie que plus ce luxe fabuleux : un salon chauffé dans le ferry ! Des douches chaudes ! Nous passons quatre jours dans le passage intérieur Alaskan, à se régaler de la vue depuis le pont, où à roder dans les pittoresques villages isolés de Sitka ou Petersburg, à trois sur le side (avec Fabien!).

Puis re-Canada, et Prince Rupert, où en guise de comité d'accueil nous rencontrons une tempête de vent qui manque d'arracher nos tentes et casse nos piquets. Sud toute !! Et dans les tous premiers jours de Novembre, nous rejoignons la route 99, qui nous ramène dans les montagnes de la Pacific Range et Whistler.

Notre balade à Eklutna Une station essence: c'est l'Alaska! Les fameux rapides des 5 doigts sur le Yukon Sur le Yukon Whitehorse Enfin, on a reçu la piece ! Il reste plus qu'à tout remonter.. ...Et on repart !! Sur le ferry Dans le passage intérieur Alaskan
Alaska 1 America 1